PROVENCE VERTE

A la recherche des sources de l'Huveaune (83)

L'Huveaune, petit fleuve d'une cinquantaine de kilomètres, arrose les cités des Bouches-du-Rhône : Auriol, Roquevaire, Aubagne, La Penne, et vient se jeter dans la Méditerranée à Marseille, non loin de la Pointe Rouge. Mais il nait dans le Var, au coeur du massif de la Sainte Baume. Partir en quête de ses sources, c'est s'immerger dans une nature animée au sens propre du terme, une nature qui vous parle. Echo persistant de légendes lointaines, nostalgie d'une harmonie disparue, crainte sourde que ce lieu mythique ne s'évanouisse... Les sources de l'Huveaune vous ont ensorcelé. Vous n'en reviendrez pas indemne.

DU MOULIN DE LA SAMBUC AU COLLET DES AUMEDES

La haute vallée de l'Huveaune a conservé son aspect sauvage, et il est facile de la découvrir en suivant le GR9, à partir du Moulin de La Sambuc, entre Saint Zacharie et Nans-Les-Pins. Ancienne scierie dont les machines étaient actionnées, au début du siècle dernier, par deux roues à aube, puis reconverti en bergerie, ce bâtiment de caractère, à l'ombre de platanes centenaires et en bordure du fleuve, devient hôtel-restaurant en 1958.


Après un quart d'heure de marche, vous parvenez à la source de Lazare, et la piste s'oriente au sud, suivant le fil de l'Huveaune, tantôt rive gauche, tantôt rive droite, avec obligation parfois de traverser la rivière : impossible de rejoindre les sources sans se tremper les pieds ... Du moins après de fortes pluies ! Le fleuve gonflé saute et tourbillonne de rocher en rocher.

Marie-Madeleine a-t-elle remonté l'Huveaune de Marseille à la Sainte Baume, comme le veut la tradition ? Ces eaux tumultueuses sont-elles, comme on le raconte parfois, alimentées par ses larmes ? Encore une petite heure de marche avant un dernier passage du fleuve, sur un pont de bois.


La vallée s'élargit, et vous apercevez la crête de la Sainte Baume où la neige s'attarde en hiver, barrant l'horizon. Au nord, de récentes cultures de vignes s'étagent en restanques. Vous atteignez rapidement le collet des Aumèdes, et la promenade se poursuit alors selon un tracé vert qui s'enfonce dans le vallon de Castelette, sous le couvert de la forêt domaniale du massif, peuplée de chênes verts.

LES SOURCES

L'Huveaune, que vous aviez quitté un instant, est bientôt là. Vous l'entendez murmurer avant de le découvrir, descendant dans un frémissement d'imposantes marches de calcaire, tombant de vasque en vasque à fond d'émeraude, sous un tunnel de verdure. Ses reflets bleu-vert sont dûs à la présence d'algues bleues, la plus ancienne forme de vie apparue sur terre , capable de transformer l'énergie lumineuse en énergie chimique. En réalité, ces "algues" ne sont pas des végétaux, mais des bactéries, contenant un pigment bleu-verdâtre, la phycocyanine.

Un coude du fleuve, une pente qui se redresse, et soudain... La source ! Brusquement, vous êtes transporté au temps des Ligures, pour lesquels l'Huveaune était la déesse Ubelka, nourricière, mais aussi redoutable et dévastatrice. C'est bien elle qui dévale les rochers, vêtue de son jupon blanc d'écume, et de son douillet manteau d'apparat de mousse vert sombre.

Le sentier balisé continue sa course escarpée à travers la forêt pour atteindre la grotte de Castelette. La salle d'entrée, longue de 30 mètres, est fermée par un siphon. Mais depuis 1968, un puits de 7 mètres, creusé par le Club Alpin Français au-dessus de la grotte, permet l'accès à un important réseau de galeries souterraines, parcourues par la rivière de Castelette. Elle donne naissance à l'Huveaune, dont vous pouvez voir, à l'est de la grotte et en période d'abondantes précipitations, les sources hautes.

L'HUVEAUNE EN PERIL ?

 

 

Si l'Huveaune prend sa source à 470 mètres d'altitude, il draine probablement une partie des eaux de pluie qui s'infiltrent sur le poljé de Plan d'Aups, perché à 650 mètres au pied de la Sainte Baume. Un bassin fermé, où l'eau pénètre lentement. Or, il semblerait que l'urbanisation progressive de la commune risque de réduire considérablement cette "zone humide".

Les larmes de Marie-Madeleine pourraient-elles se tarir un jour? La déesse Ubelka viendra-t-elle à dépérir, perdre ses sautes d'humeur et ses extravagances, son lit de tuf et d'émeraudes ? Ou le projet de Parc Naturel Régional du Pays Sainte Baume viendra-t-il à son secours ?

voir l'avis de Fred