CAMARGUE

Le Parc de Pont de Gau : le monde des oiseaux

A 4 kms des Saintes-Maries-de-la-Mer, le parc ornithologique de Pont de Gau s'étend sur 60 ha de marais, roselières, étangs, sansouires... Un lieu d'accueil idéal pour une faune sauvage dont de nombreuses espèces d'oiseaux, variables selon les saisons. Sept kms de sentiers jalonnés d'observatoires permettent au visiteur de partager de brefs instants de leur vie intime : comportement en colonie, recherche de nourriture, parades nuptiales, accouplement, nidification, nourrissage des jeunes. Un lieu de vie pensé et conçu pour répondre aux besoins primordiaux des oiseaux sédentaires et migrateurs, la Camargue étant pour ces derniers, une halte essentielle.

DES MIGRATIONS TRES DIVERSIFIEES

Si les causes de la migration ( manque de nourriture disponible, recherche de conditions optimales de reproduction ), apparaissent aujourd'hui évidentes, le phénomène en lui-même demeure mal connu. Certains oiseaux voyagent de jour, d'autres de nuit ; certains volent sans interruption, d'autres font de nombreuses étapes, pour se reposer et pour se nourrir. "On pense qu'ils s'orientent grâce à divers sens : la vue, les étoiles, le champ magnétique terrestre..." précise notre guide, Benjamin, salarié du Parc.

l'échasse blanche en France se reproduit principalement en Camargue. Elle hiverne en Afrique
l'échasse blanche en France se reproduit principalement en Camargue. Elle hiverne en Afrique

 

 

 

" Les vrais migrateurs  utilisent des couloirs assez précis. D'autres, comme les flamants, pratiquent l'erratisme ou la dispersion. D'autres encore, colonisent peu à peu de nouveaux territoires, comme le héron gardeboeufs, originaire d'Afrique et qui remonte peu à peu en Europe ; ou comme la tourterelle turque, native d'Asie, et dont l'habitat s'étend sans cesse."
  

guêpier d'Europe
guêpier d'Europe

Le rollier d'Europe et le guêpier d'Europe, ces magnifiques oiseaux aux couleurs vives qui se nourrissent exclusivement d'insectes, passent l'hiver en Afrique, mais remontent aux beaux jours en Europe, où ils trouvent de meilleurs sites de nidification. Ci-contre, le guêpier,oiseau assez craintif, niche le plus souvent en colonie, à proximité des cours d'eau, dans une carrière de sable ou sur le flanc d'un talus ; il y creuse un tunnel au bout duquel une petite chambre abritera les oisillons pendant 3 à 4 semaines.

rouge gorge
rouge gorge

 

Les passereaux aussi traversent la Méditerranée ; ils font auparavant une halte en Camargue, où ils vont parfois aller jusqu'à doubler leur poids avant le grand voyage. "Cette aventure équivaudrait, pour un être humain de 70 kgs, à courir pendant 24h, à la vitesse de 80 kms/heure, avec un poids de 140 kgs... " certains oiseaux changent de régime alimentaire au lieu de migrer ; par exemple, le rouge-gorge, insectivore, se nourrit de graines en hiver."

faucon crécerelle
faucon crécerelle

 

Les rapaces utilisent les courants d'air chauds, et ne peuvent franchir la mer. "Ceux qui viennent du nord font halte en Camargue avant de longer le rivage, rejoindre l'Espagne et le détroit de Gibraltar, ou la Turquie et Israël. Pour eux aussi, la Camargue fait office de "station service".

Ici, un faucon crécerelle, migrateur partiel.

Quant aux canards du nord de l'Europe, ils descendent vers le sud dès les premiers grands froids, fuyant les eaux gelées des marais. "250 000  hivernent en Camargue."

LE BAGUAGE, UN SUIVI SCIENTIFIQUE

 

En 1899, l'ornithologue danois Hans Christian Cornelius Mortensen, pose les premières bagues sur des étourneaux. En France, le baguage commence en 1911, et à ce jour, plus de 6 300 000 oiseaux ont été bagués. Une activité gérée par le Centre de Recherches par le Baguage des Populations d'Oiseaux. (C.R.P.B.O.) "La bague en aluminium, placée sur le tarse ou le tibia de l'oiseau comporte un numéro unique. C'est le meilleur outil pour recueillir des informations sur les migrations, les zones d'hivernage et de nidification, les lieux de halte, la vitesse des oiseaux et leur longévité" .On compte en France 400 bagueurs assermentés, autorisés à capturer les oiseaux, souvent à l'aide d'un filet tendu entre 2 perches.

 

 "A cette occasion, l'oiseau est identifié. On relève l'espèce, le sexe, l'âge, le poids et la longueur de l'aile."

Des connaissances techniques que le bagueur doit parfaitement maitriser. Les données , informatisées, sont transmises au Museum d'Histoire Naturelle de Paris.

 

LA GESTION DE L'HABITAT

Depuis sa création par André Lamouroux, un camarguais, il y a tout juste 60 ans, le Parc de Pont de Gau n'a cessé d'évoluer. D'un "parc zoologique" recueillant les oiseaux blessés, il est devenu le miroir de la Camargue, un lieu privilégié où se trouve concentrée une faune sauvage par ailleurs difficile à approcher, et dont les caractéristiques et les modes de vie font l'objet de panneaux éducatifs. Des visites guidées s'y déroulent régulièrement.

 

 

 

 

"Ici,la végétation est conditionnée par l'eau salée. La sécheresse du climat méditerranéen entraine en été une remontée de sel, et nous avons des paysages de sansouire, avec des plantes typiques, comme la salicorne et la saladelle.

 

 

Grâce à l'aménagement d'un réseau de canaux amenant de l'eau douce, nous avons par endroits marais et roselières. Cette diversité du terrain favorise aussi la diversité de la faune."

Au printemps, prend fin la migration, et commence la reproduction. Le Parc Ornithologique essaie alors de répondre aux besoins des espèces les plus rares, pour les inciter à nicher chez lui. "Nous avons créé un îlot artificiel, avec contrôle constant des niveaux d'eau, et nous avons vu arriver les goélands railleurs. Ils se mêlent aux mouettes rieuses et à tête noire." Grâce à ce savant dosage de sel dans les marais, le Parc héberge, à 3 kms de la mer, sternes naines et avocettes.

La héronnière a 10 ans d'existence ; elle est en fin de vie. "L'arbre s'est dénudé et va mourir. Il abrite hérons cendrés, aigrettes et gardeboeufs. Le bihoreau n'est pas resté ; il vit plutôt la nuit, et aime à se cacher. Après la période de nidification, l'arbre sert de dortoir, et on y a compté jusqu'à 700 à 800 hérons."

Les flamants roses (incontournables en Camargue), ne vivent qu'en eau salée. "Ils sont programmés pour être roses, et la petite crevette qu'ils ingèrent, Artemia Salina, ne fait qu'accentuer cette couleur. C'est en décembre qu'elle atteint son intensité maximale, au moment des parades nuptiales."

 SECOURS AUX ANIMAUX

cigogne noire
cigogne noire

 

 

Quelques oiseaux sont captifs dans de grandes volières. "Ce sont tous des oiseaux blessés que nous avons recueillis ; le hibou grand duc est capable de se reproduire en captivité, et nous avons eu 2 petits cette année." On peut aussi voir le circaète Jean-le Blanc, l'aigle de Bonelli, de plus en plus rare dans la nature, ou la cigogne noire, représentée ici ; une migratrice dont on a découvert de rares couples nichant en France.

"Mais c'est naturel, tout ça ?" demande une jeune femme à son compagnon, en embrassant le Parc d'un geste large. "Bien sûr, ça se voit ; ils n'ont mis que quelques rondins autour des étangs pour éviter l'érosion..." Tout le succès du Parc Ornithologique est là ; travaux et aménagements permanents s'effacent devant une nature qui s'est réapproprié l'espace.