En 2013, les collectifs "Non au Gaz de schiste" se sont mis en veille. La fracturation hydraulique était interdite, et le "permis dit de Brignoles" avait été abrogé... "Mais aujourd'hui, les pressions s'accentuent du fait de la crise, et la vigilance s'impose" a expliqué Denis Plaisir, président de l'ADSECA (Association de Défense des Sites et de l'Environnement de la Commune d'Aups), et responsable du collectif d'Aups, lors d'une réunion le 11 février 2014, pour faire le point sur la situation.
DEUX ANS DE COMBAT
Les collectifs se sont battus durant deux ans, avec deux dates clés au départ : le 20 janvier 2011, le jour où Brigitte Grivet, ingénieur agronome découvre que la société Schuepbach a déposé un permis d'exploitation des GDS à l'insu de la population et des élus ; et le 12 mars 2011, quand une conférence d'information rassemble 250 personnes dont des élus à Salernes.
Deux autres dates marqueront la fin des débats, du moins momentanément : le 13 juillet 2011, avec la promulgation de la loi Jacob, qui interdit la fracturation hydraulique. Enfin le 12 octobre 2012, Delphine Batho, ministre de l'Environnement annonce officiellement l'abrogation du "permis dit de Brignoles".
Denis a rappelé cette longue lutte. "Dès le 24 février 2011, le Collectif 83 voit le jour, avec Brigitte Grivet, Pierre Arnoult, qui sera l'un des piliers du mouvement, Christian Depret, qui ouvre le blog et le tiendra à jour, Julien Beltramo, ingénieur et Josiane Le Goff, de Cobionat Salernes. Après la réunion du 12 mars à Salernes, les actions s'enchainent."
Le 24 mars 2011 à Aups : vote d'une motion interdisant l'exploitation des GDS sur la commune. "Le Conseil Général ainsi que le PNR du Verdon expriment leur opposition au GDS."
Le 26 mars 2011 à Draguignan : marche symbolique avec la LPO et les associations de randonneurs.
"Des collectifs se créent : ils recueillent en un mois 7000 pétitions, qui sont remises au sous-préfet de Brignoles le 14 avril 2011".
Le 26 novembre 2011 : lancement de collectifs dans chaque village. On en comptera plus de 100 sur 153 communes.
Le 7 avril 2011 : Aups reçoit la Coordination Nationale au Centre Culturel.
Le 8 avril 2012 : rassemblement national à La Seyne/mer.
Les maires de 102 communes du Var prennent des arrêtés municipaux d'interdiction d'exploitation des GDS au titre de la préservation de l'eau et de la circulation Poids Lourds. "Il faut préciser qu'ils sont responsables pénalement et civilement de la qualité de l'eau. Ceci nous a semblé un argument juridique fort, d'ailleurs aucun de ces arrêtés n'a été rejeté en Préfecture".
Le 12 octobre 2012 : Delphine Batho, ministre de l'Ecologie,
du Développement Durable et de l'Energie, annonce officiellement
l'abrogation de "Permis dit de Brignoles".
2013 : les collectifs se mettent en veille. Ceux de la côte ayant
des problèmes un peu divergeants, se dissocient du Collectif 83.
Le 4 décembre 2013 : lors d'une assemblée générale à Draguignan
où 26 collectifs sont représentés, un maintien des associations est décidé.
AUJOURD'UI LA VIGILANCE S'IMPOSE
Aujourd'hui, tout est bon pour faire pression sur le public et faire valoir les "intérêts" de l'exploitation des GDS. La crise économique demeure un argument "de choix".
Le 22 janvier 2014, la Communauté Européenne a décidé de laisser aux états européens la liberté d'exploiter leurs GDS, en respectant des principes minimaux en ce qui concerne l'environnement.
"Nous connaissons la position d'Arnaud Montebourg. Le ministre du Redressement Productif ramène régulièrement le sujet sur le tapis.
Celle de Laurent Fabius. Le ministre des Affaires Etrangères disait encore le 10 février dernier : "Ma position est simple, le système actuel de fracturation hydraulique est mauvais pour l'environnement. Donc ce n'est pas celui-là qu'il faut exploiter. En revanche, que l'on fasse des recherches pour savoir s'il y a une autre possibilité d'exploiter le GDS, ça me parait normal."
"J'ai été plus étonné", explique Denis, "de la déclaration de Maud Fontenoy. La navigatrice, membre du Conseil Economique Social et Environnemental, vice-présidente du Conservatoire du Littoral, porte-parole de l'UNESCO pour les océans, et présidente d'une Fondation en faveur des océans, vante une nouvelle méthode d'extraction de GDS par fracturation au fluoropropane... au nom de l'écologie.
Jean-Louis Schilansky, président de l'Union Française des Industries Pétrolières, continue à plaider en faveur de l'exploitation des GDS, et a déclaré en début d'année : "C'est une longue saga, mais nous n'abandonnerons pas."
"Nous sentons bien", souligne Denis,
"qu'au regard de ces discours, le salut de la France ne peut passer que par l'exploitation des GDS".
Et il reste encore en suspens :
LA FRACTURATION AU FLUOROPROPANE
"Cette technique utilise le fluoropropane, un gaz à effet de serre, beaucoup plus cher que l'eau", précise Denis. "Cette méthode est-elle rentable ? A-t-elle fait ses
preuves ? A ce jour, aucun test n'a été
validé."
Le flou le plus total existe encore autour de cette nouvelle technique développée en 2013 par
Ecorpstim, une société basée au Texas.
Elle affirme que le fluoropropane, non inflammable, ne demanderait aucune addition d'eau ni de produits chimiques, ne présenterait aucun danger pour la santé et des risques très
limités pour l'environnement... voir site
Ecorpstim
Pierre Thomas, professeur de géologie à l'Ecole Normale Supérieure de Lyon, explique : "le fluoropropane fait partie de la famille des CFC (chlorofluorocarbures), des gaz hautement nocifs pour la couche d'ozone. Très longtemps utilisés dans l'industrie pour les mousses, les aérosols ou les extincteurs, ces gaz ont été
interdits dans de nombreux pays par la Convention de Montréal, signée en 1985." |
"Quelle que soit la méthode de fracturation", souligne Denis, "laquelle n'est qu'une étape de l'exploitation des GDS, il y aura toujours une dégradation environnementale dans le sous-sol provençal inconnu, entrechoqué.
Le GDS, une ressource économique ? Le Var est un département dont le tourisme demeure la principale ressource, difficilement compatible avec cette industrie.
La formation des GDS a nécessité une lente maturation géologique durant des millions d'années, que nous dépenserions ainsi en quelques décennies.
Leur exploitation est une filière émettrice de CO2, alors que la France s'est engagée à réduire ses émissions."
L'ACCORD DE PARTENARIAT TRANSATLANTIQUE
"N'oublions pas le Traité Transatlantique", a aussi insisté Yvette Elie-Gardini, trésorière du Collectif 83. "On n'en parle pas, mais s'il est signé, les lois françaises pourraient être annulées, et certaines infractions seraient jugées par des tribunaux privés".
Nouvelle version de l'Accord Multilatéral sur Investissement (AMI) mijoté par l'OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economiques) entre 1995 et 1997 et alors rejeté, l'APT, discuté entre l'Union Européenne et les Etats Unis depuis juillet 2013, devrait aboutir en 2015.
Ce traité de libre échange obligerait les pays à obéir aux normes fixées par et pour les grandes entreprises européennes et américaines.
Dans le cas contraire, ils pourraient être poursuivis devant des tribunaux spécifiques, et subir des sanctions commerciales ou des pénalités financières.
Denis a conclu en invitant le public à rester mobilisé et à adhérer à l' Association pour la Sauvegarde du Patrimoine Naturel (ASPN ) créée par Pierre Arnoult." Il est nécessaire de défendre la transition énergétique et de s'intéresser aux énergies renouvelables."
Dans le cadre du Festival de la Terre organisé par "Colibris Dracénie" (bientôt "Colibris Dracénie Haut Var), qui se déroulera du 15 mai au 20 juin 2014, l'ADSECA, l'ASPE (Association Sillanaise pour la Protection de l'Environnement), la Biocoop de Salernes, avec la participation du PNR du Verdon, organisent une conférence avec Pierre Rabhi le 15 mai 2014 à Draguignan.
Et une conférence à Aups le 27 mai 2014 avec Benoit Thévard : "un avenir sans pétrole".