LE VAL D'ARGENS

Les étangs de Villepey

Une réserve assiégée

Les étangs de Villepey, à l'embouchure de l'Argens, couvrent 260 ha. Ils sont propriété du Conservatoire du Littoral, et intégrés au réseau européen Natura 2000. Avec un climat plus doux que la Camargue et un milieu moins salé que la presqu'île de Giens, deux zones humides auxquelles on les compare parfois, ils comportent d'autres spécificités, et demeurent importants pour la biodiversité du Var et de la Provence. Prise en tenaille entre Saint Aygulf et Fréjus, coupée du littoral par la N98, cette lagune fait l'objet de visites guidées, tout particulièrement en février, lors des journées mondiales des zones humides.

LES DUNES

ganivelles de châtaignier
ganivelles de châtaignier

Quand le Conservatoire du Littoral acquiert le site (la procédure s'est déroulée de 1980 à 2005), son premier souci est de maintenir les dunes, à l'aide de ganivelles de châtaignier. "Cette zone avait beaucoup souffert lors de la rupture du barrage de Malpasset", observe Denis, guide naturaliste. "La vague géante avait alors déferlé jusqu'ici..." Les dunes abritent des plantes adaptées aux conditions extrêmes : le sable est mouvant, poreux, siliceux, et surchauffé à certaines époques de l'année. Ici se sont installés l'euphorbe des sables, le lys de mer, l'échinophorbe épineuse et le panicaut maritime.

panicaut maritime
panicaut maritime
emblème du Conservatoire du Littoral
emblème du Conservatoire du Littoral

Le panicaut maritime ou chardon bleu, est une plante commune à toutes les dunes de France, que ce soit en Méditerranée, Atlantique, Manche ou en Mer du Nord. Il est l'emblème du Conservatoire du Littoral. "Des insectes très particuliers ont été recensés dans ces zones humides et légèrement salées, dont le mode de vie est lié aux laisses de mer et bois échoués. Tout récemment, on a découvert une colonie de scarabées africaine".

ROSELIERES ET AUTRES PLANTES

Différentes sortes de roseaux se côtoient à Villepey : le phragmite, le grand roseau appelé Canne de Provence ou encore roseau à quenouille, utilisé pourt la réalisation de canisses, et la canne de Pline, apportée à Fréjus par les Romains. "C'est une plante endémique dont on étudie actuellement le mode de reproduction, par les racines, mais peut-être également par les graines".

fleur de tamaris
fleur de tamaris

 

 

C'est à Fréjus que l'on peut encore voir les derniers lauriers roses sauvages, et le muflier gueule de loup sinueuse. Près des étangs poussent les asperges maritimes qui arborent en hiver de petits fruits corail, et des tamaris d'Afrique.

Habitat temporaire des hirondelles en transit, la roselière recèle de nombreuses espèces d'oiseaux paludicoles, dont le bruant des roseaux, la mésange ramiz, le blongios nain ce minuscule héron, et la lusciniole à moustaches. "Cinq couples commencent à chanter pour la reproduction". D'autres animaux représentent un enjeu important : les amphibiens, les poissons et reptiles, les mammifères dont les chauve-souris friandes de moustiques et le campagnole amphibie. "On compte quelques 300 cistudes, une population très saine, qui se régénère".

DES ESPECES DITES "INVASIVES" 

cygne et foulques
cygne et foulques

2010 est l'année de la biodiversité. Une biodiversité de plus en plus menacée : par les humains, de par leur nombre et leur mode de vie, et par la prolifération des espèces exotiques dite "invasives", qui conduisent à la mondialisation des paysages. "Très expansives, ces plantes stérilisent les milieux où elles se fixent en éliminant les plantes concurrentes et les animaux présents ; on les dénonce, mais elles poursuivent leur chemin... Dans les marais, le chèvrefeuille du Japon, le mimosa, et l'herbe de la Pampa qui aime l'humidité et dont les graines peuvent se disperser jusqu'à 25 kms à la ronde, gagnent du terrain. Les ragondins pullulent. Trois ou quatre couples de cygnes, parfaitement adaptés, semblent chasser les flamants roses qui ont pratiquement disparu. Il y a une quizaine d'années, on en dénombrait environ 40. En ce mois de février, ils sont deux. La tortue de Floride tente de s'imposer face à sa rivale, la cistude, et la perruche à collier, d'origine Moyen-Orientale, remonte désormais jusqu'à Roquebrune..."

ragondin
ragondin
inséparable
inséparable

Originaire d'Amérique du Sud, le ragondin a été introduit en France pour sa fourrure. L'inséparable, oiseau d'élevage, a trouvé ici un havre d'accueil.

Le pin parasol ou pin pignon, introduit en -650 avant J.C.a pris possession des paysages côtiers pour notre plus grand bonheur. Il est aujourd'hui protégé, et ses fruits sont un délice.

DES PROJETS, DES PROJETS...

L'urbanisation intensive des alentours n'est pas sans conséquence sur ce site qui conserve encore des paysages somptueux, entre mer et montagne. Ce petit coin de paradis, que l'on a quelques difficultés à qualifier de "nature", tant on le sent cerné, acculé, infiltré, par les villes tentaculaires qui l'encadrent, survit cependant sur un équilibre précaire, soutenu par la commune de Fréjus qui en est le gestionnaire, et des associations de défense de l'environnement. Certes, on y découvre des espèces rares, tant floristiques que faunistiques, et le spectacle des oiseaux au petit jour sur les étangs reste fascinant. Mais de gros problèmes persistent.

Denis Huin
Denis Huin

 

"La construction de la N98 a perturbé le cycle naturel des échanges d'eau" explique Denis. "L'Argens, dont le courant s'amenuise parce que chichement alimenté par ses affluents, voit son embouchure obstruée par un banc de sable de plus en plus fréquemment. La quantité d'eau douce qui pénètre dans les marais augmente sans cesse, et ils perdent leur salinité. Petit à petit, la sansouire disparait. Dans les étangs de plus en plus confinés, les algues se multiplient, mettant en danger la vie des poissons. Plusieurs solutions ont été envisagées, comme le détournement de la route vers le nord, ou une canalisation, qui relierait la lagune à la mer. La plus logique est la réalisation d'une martelière sur la lône des Esclamandes, pour limiter les entrées d'eau douce. Son installation est prévue début 2010. Autre projet : la construction d'une passerelle qui enjambera l'embouchure de l'Argens..."

 LA CONVENTION DE RAMSAR

Depuis le 2 juillet 2008, les étangs de Villepey sont inscrits sur la liste des zones humides de la Convention de Ramsar, acquérant ainsi une reconnaissance internationale. Cette Convention, signée le 2 février 1971 à Ramsar, ville iranienne située sur les rives de la mer Caspienne, est le fruit du travail de différentes associations de protection de la nature, inquiètes de la disparition de vastes étendues de marécages et des oiseaux qui les fréquentaient en Europe. Entrée en vigueur en 1975, la Convention a pour mission "la conservation et l'utilisation rationnelle des zones humides par des actions locales, régionales et nationales et par la coopération internationale, en tant que contribution à la réalisation du développement durable du monde entier". Elle regroupe en 2010, 159 états membres soit 1886 sites pour un total de 185 156 612 ha. La France, quant à elle, y est représentée avec 36 sites, soit 3 314 275 ha. Tous les ans, le 2 février, on commémore la signature de cette Convention, en célébrant la journée mondiale des zones humides, à travers conférences, débats et sorties nature.

Deux ouvrages pour mieux connaitre les oiseaux et les plantes de Provence : Atlas des oiseaux nicheurs de Provence-Alpes-Côte d'Azur ; Le Var et sa flore. Plantes rares ou protégées

Liens : Ville de Frejus

           Conservatoire du Littoral

            Conservatoire Botanique Méditerranéen

            Reptil'Var

            CEEP Espaces Naturels de Provence

            Convention de Ramsar

            La ferme des Esclamandes : elle héberge l'association Semailles 83, qui pratique une activité de réinsertion à travers les travaux du potager, de la cuisine, et d'atelier de savoir faire traditionnel, en particulier avec la canne de Provence.