HAUT VAR

Le temps des olivades

Sillans la cascade

Certes, la culture de l'olivier a chuté en Provence après le terrible gel de 1956 : plus de 50 000 ha de vergers, contre 15 000 aujourd'hui. Mais cet arbre mythique demeure le symbole de la région, et sa silhouette trapue au feuillage vert argenté dansant dans le soleil sous la baguette du mistral, est au coeur du paysage. Automne-hiver, c'est le temps des olivades, autrement dit la récolte des olives. "2010 est une année exceptionnelle", a confirmé Rémi Pécout, conseiller oléicole à la Chambre d'Agriculture du Var, venu rencontrer les Sillanais. La commune possède une oliveraie d'environ 350 arbres, non traitée depuis plus d'un demi-siècle. Un production d'huile biologique à envisager, peut-être...

PLUS DE CINQUANTE VARIETES DANS LE VAR

Au Bastidon, en contrebas du village, on compte environ une quinzaine de variétés d'olives. "Il peut s'agir d'arbres âgés de plus de 1 000 ans peut-être, voire plus au niveau des souches". Sillans se situe à la limite nord de l'olivier, qui s'étend tout au plus jusqu'à Manosque. "Dans le Var, on dénombre plus de 50 variétés : le Cayon, dont l'olive au long pédoncule donne une huile douce, sans ardence, qui ne se garde qu'environ 6 mois." C'est une olive de table parfaite. En tant qu'huile, on l'utilise en principe en mélange" ; l'Aglandeau, qui présente une olive assez résistante au froid, et un bon rendement en huile. "Elle est très amère, l'huile peut se conserver 2 à 3 ans" ; le Bouteillan, une grosse olive, presque ronde, poussant en bout de rameau, et à la chair abondante ; la Salonenque, dont l'olive, un peu en forme de poire et riche en huile, présente peu d'amertume ; le Gros Ribier, une assez grosse olive un peu pointue, sur un arbre gros et puissant... "Dans un même champ, il est important de planter plusieurs variétés, car l'olivier n'est pas auto-fertile. La pollinisation s'effectue par le vent."

"A LA TOUSSAINT, L'OLIVE A LA MAIN" (dicton provençal)

cueilleur sur son chevalet
cueilleur sur son chevalet
olives après le gel
olives après le gel

On peut encore observer dans les vergers la collecte manuelle : le cueilleur, perché sur le chevalet ou cavalet, une large échelle de bois à trois pieds, a étendu son filet au sol. "Mais peignes, vibreuses et gauleuses électriques remplacent de plus en plus peignes à main et gaules d'antan. Plus rare en Provence est l'utilisation de gros matériel sur tracteur". Selon les variétés et l'usage que l'on souhaite en faire, la récolte des olives s'étale de novembre à fin mars. "Pour l'huile, il est préférable d'attendre les premières gelées, à -6° maximum toutefois". L'olive verte mûrit, prend une teinte violine, et devient de plus en plus noire. "Plus grande est sa maturité, plus faible est sa concentration en eau, et plus forte sa concentration en huile. Sa résistance au gel augmente...Mais ses arômes s'estompent. Des arômes que l'on compare à l'artichaut, la pomme, la tomate, l'herbe coupée, l'odeur de la truffe ou du sous-bois". Huit kilos d'olives, en moyenne, seront nécessaires pour obtenir un litre d'huile. "Cette année, nous avons eu une très brève gelée, qui va améliorer le rendement de l'olive". Au moulin, les olives passent successivement à la laveuse, broyeuse, au malaxeur et à la centrifugeuse. "Il convient d'apporter rapidement les olives au moulin, et de n'avoir que des fruits sains, qui ne soient ni pourris, ni gelés, car cela gâterait le goût de l'huile. Le grignon (résidu de chair, eau et noyaux), peut être utilisé comme fertilisant, dans les vignes plutôt qu'en maraîchage".

 

Pour l'olive de table, la cueillette s'effectue plus tôt. Très amère, l'olive est le seul fruit qui doit être traité avant dégustation. "Passée dans un bain de soude, elle doit subir ensuite des rinçages répétés. Puis, elle est mise en bocaux dans une saumure qui va poursuivre la désamérisation, et assurer la conservation. Il faudra alors attendre au moins deux mois avant dégustation".

"L'OLIVIER DE 100 ANS EST ENCORE UN ENFANT" (dicton)

olivier rejets
olivier rejets

 L'olivier a la réputation d'être immortel. Sa souche meurt ? La vie jaillit de ses rejets. "C'est un arbre primitif, très ancien, qui colonise les sols en formation. Il s'accomode des sols pauvres, mais on constate aujourd'hui une destruction des sols, consécutive à l'apport d'engrais chimique répétés. On doit bien sûr lui apporter du compost régulièrement, et un vieux dicton affirme "oins-moi le pied, je t'oindrai le bec". Il a une croissance lente, et ses racines peuvent descendre à plus de cinquante mètres de profondeur. S'il est souvent peu élevé, c'est qu'il est taillé pour faciliter la récolte."Après une grosse récolte, une taille sévère est nécessaire, et il est recommandé d'en effectuer une tous les 4 à 6 ans".

Jadis planté en restanques dans la colline, l'olivier est descendu dans la plaine avec la mécanisation. "Il y est malheureusement plus exposé à l'humidité...L'olivier ne meurt que par noyade".

L'oliveraie de Sillans, qui n'a reçu aucun soin depuis longtemps, ne se porte pas si mal. "Les arbres se sont développés à leur propre rythme, ils sont sains". Un atout pour la commune, et cette année encore, nombre de villageois étaient au rendez-vous pour les olivades.