ENERGIE VAR GAZ DE SCHISTE

"Permis de Brignoles"

La résistance s'organise

Julien Beltramo, docteur en géologie, à Sillans la Cascade le 21/1/2012
Julien Beltramo, docteur en géologie, à Sillans la Cascade le 21/1/2012

Voilà bientôt un an que la population varoise et ses élus découvraient avec stupéfaction l'existence du "Permis de Brignoles", ce permis à exploiter les gaz de schiste sur les 3/4 du territoire du Var, et qui déborde sur les départements limitrophes des Alpes de Haute Provence, des Alpes Maritimes et des Bouches du Rhône. Contre l'exploitation très coûteuse et non sans risque de ce gaz de roche, la résistance s'organise chaque jour un peu plus. Une cinquantaine de collectifs se sont déjà créés dans villes et villages, et les maires se mobilisent. Bilan en ce début d'année 2012, avec le collectif de Sillans la Cascade.

 

SEIZE ANS DE NOTRE CONSOMMATION ACTUELLE 

carte des gaz de schiste dans le monde quantités exprimées en milliers de milliards de m3. "Dans le monde, les ressources en gaz de schiste seraient du même ordre que celles de gaz conventionnel, et ces ressources seraient mieux réparties. Des chiffres "trainent partout", difficiles à vérifier"
(Eduscol)

"Le développement de notre société est lié à l'énergie", a rappelé Julien Beltramo, géologue. "Les grands réservoirs de gaz conventionnel se trouvent au Moyen Orient et en Russie. Si l'on prélève le gaz au niveau de la roche mère (autrement dit, si l'on exploite le gaz de schiste ou gaz d'argile), l'éventail des gisements dans le monde est beaucoup plus large. Principalement aux USA (où il représente 20% du marché de l'énergie), et en bien moindre quantité en Europe.

La quantité évaluée en France serait de quelques 800 milliards de m3, soit l'équivalent de 16 ans de notre consommation actuelle. Et il faudrait pour les extraire... creuser 600 000 puits !" L'indépendance énergétique ? "Nous devons faire appel à des compagnies étrangères pour une exploitation dont nous ne possèdons pas la technologie nécessaire. Enfin, exploitation et consommation de ce gaz produisent du CO2. La focalisation sur le gaz de schiste entrave la recherche de solutions avec les énergies renouvelables, comme le soleil".

 

LA LOI DE 2011 NE NOUS PROTEGE PAS 

Face aux risques sanitaires et environnementaux (pollution de l'eau, de l'air et du sol, éventuels tremblements de terre dont la puissance peut atteindre 5 sur l'échelle de Richter), minimisés par les pétroliers, mais bien connus et dénoncés par une partie grandissante de la population, le gouvernement a promulgué la loi du 13 juillet 2011 (n°2011-835), "visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique".

plateforme de forage( photo David Boily Archives La Presse)
plateforme de forage( photo David Boily Archives La Presse)
 exploitation du gaz de schiste dans le Wyoming (www.DamascusCitizen.org)
exploitation du gaz de schiste dans le Wyoming (www.DamascusCitizen.org)

"Et c'est ainsi que certaines sociétés parlent aujourd'hui de "stimulation hydraulique", comme Toreador, ou de "fracturation conventionnelle", comme Mouvoil. Le PDG de Total, lui, ne se cache pas de vouloir "contourner la loi". Des exploitants mettent en avant "l'intérêt d'une expérimentation pour la recherche scientifique"... Bref, la loi ne nous protège pas", souligne Julien. Et d'ailleurs, le Colloque du Club Energie et Développement, présidé par François Michel Gonnot  (député et président du Conseil d'Administration de l'Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs depuis 2005), qui s'est déroulé à Paris le 17 janvier 2012, affichait nettement ses ambitions avec des annonces comme "la France peut-elle se passer d'une ressource, les hydrocarbures de schiste ?" ou "l'interdiction française, comment en sortir? " François Michel Gonnot est également le co-rapporteur, avec Philippe Martin, d'une enquête sur le gaz de schiste dont le texte a été déposé à l'Assemblée Nationale le 8 juin 2011. Tandis que P.Martin estime pour conclure que " la France doit renoncer à extraire de son sous-sol les hypothétiques gaz et huiles de schiste qui s'y trouveraient", F.M.Gonnot "espère" que le "dossier des huiles et gaz de schiste restera ouvert pour être traité demain sans passion, mais avec sérieux et méthode". en savoir plus

 


LES ELUS S'IMPLIQUENT

Pierre Jugy maire de Tourtour
Pierre Jugy maire de Tourtour

 

 

Pierre Jugy, maire de Tourtour assistait à ce colloque "où étaient réunies plus de 2500 personnes, dont l'entrée était très chère et où aucune voix ne s'est élevée pour parler des dangers inhérents à l'exploitation des gaz de schiste". Très impliqué dans la lutte, il rappelait son incrédulité lors de la découverte du dépôt du "Permis de Brignoles", dont les élus n'avaient pas été avertis. "Nous avons été pris de court, mais aujourd'hui, nous sommes debout sur les pédales". Il a été parmi les premiers dans le Var à prendre des arrêtés municipaux pour interdire les forages sur sa commune.

 

"Les 153 maires du département ont été sollicités pour suivre le mouvement, et j'espère qu'ils répondront favorablement, ne serait-ce que parce qu'ils sont responsables de l'eau sur leur territoire, et que la conservation de sa qualité est incompatible avec l'exploitation du gaz de schiste.  On ne peut nous demander de protéger l'environnement, et venir polluer avec le gaz de schiste". Il organisera le 18 mars prochain à Tourtour une réunion avec les élus du Var (maires, conseillers, députés et sénateurs), où seront conviés toxicologue, chimiste, hydrologue et sismologue.

site C.E.A.Cadarache
site C.E.A.Cadarache

 

 

 

 

 Le "Permis de Brignoles" concerne une région sismique. Le Centre de Recherche Nucléaire de Cadarache ( le site accueillera Iter) est construit sur la faille d'Aix en Provence-Durance, et à 17 kms de la faille de la Trévaresse, responsable du séisme de Lambesc en 1909. Ce séisme d'une puissance de 6,2 sur l'échelle de Richter, a fait 46 morts et 250 blessés. En savoir plus

 

 

"Et imaginons qu'un tremblement de terre survienne à proximité du Verdon, avec ses barrages en cascade... Ce serait une catastrophe sans précédent".

barrage de Sainte Croix
barrage de Sainte Croix

 

A SILLANS

Eric Renoult, président de l'ASPE
Eric Renoult, président de l'ASPE

La réunion de Sillans s'est déroulée en présence du maire, Christian Grimaldi, qui a, lui-aussi, pris des arrêtés pour interdire les forages concernant la recherche de gaz de schiste sur sa commune le 5 décembre 2011, de Steve Kay, conseiller municipal et référent du collectif sillanais, et d'Eric Renoult, président de l'Association Sillanaise pour la Protection de l'Environnement."Nous devons travailler  de concert pour le retrait du "Permis de Brignoles". S'il devient nécessaire de manifester, nous aurons besoin du soutien de tous", a conclu ce dernier.

A VOIR

Documentaire de France Mercille et Luce Cloutier, montage François Grondin, d’une durée de 43 minutes ce documentaire révèle l’impact sur les personnes vivant près des puits de gaz de schiste.La fracturation du sol pour libérer le gaz de schiste fracture aussi les hommes, les femmes et les enfants . Ce documentaire a reçu une motion à la chambre des communes par mr. Mathew Dubé du NPD.