LES ORCHIDEES DU VAR

Modestes et fascinantes

J.Claude Décugis vice-président des "Amis du Museum d'Aix en Provence"
J.Claude Décugis vice-président des "Amis du Museum d'Aix en Provence"

Si la plupart des orchidées se développent dans les pays tropicaux, elles poussent aussi chez nous. Certes, celles du Var sont de taille plus modeste, de formes et de couleurs moins exubérantes et sophistiquées, mais elles demeurent tout aussi fascinantes de par leur mode de vie.

En ce début mars, elles commencent à fleurir, et J.Claude Décugis, vice-président des "Amis du Museum d'Aix en Provence", a découvert l'une des premières à ouvrir ses boutons, l'orchis géant, lors de sa visite à Sillans pour une conférence dans le cadre du "Premier Salon International des Orchidées". Une manifestation organisée par des passionnés de ces fleurs troublantes, avec le soutien de la municipalité et du Syndicat d'Initiative.

LES PIEDS SUR TERRE

Sillans, expo-vente d'orchidées au salon
Sillans, expo-vente d'orchidées au salon
orchidée sauvage dans les marais de Saint-Estève
orchidée sauvage dans les marais de Saint-Estève

Combien d'orchidées sur terre ? "Environ 25 000, sans compter les hybrides", explique Jean-Claude. "Et l'on en découvre de nouvelles régulièrement".

Sous d'autres latitudes, ce sont des plantes épiphytes. Elles croissent sur la canopée, au sommet des arbres. "Leurs racines aériennes absorbent l'eau chargée de substances nutritives qui dégouline des arbres, et elles profitent de la lumière du soleil pour leur photosynthèse".

Dans le Var, on répertorie une centaine d'espèces. "Ici, elles ont les pieds sur terre, et sont entièrement dépendantes de leur hôte, un champignon microscopique, avec lequel elles vivent en symbiose. Aussi, il est inutile de déterrer une orchidée trouvée dans la nature, pour la replanter dans son jardin. Otée de son milieu, elle ne survivra pas".

DES PLANTES DE L'AGE DES DINOSAURES

abeille portant pollines d'orchidée noyée dans de l'ambre 20 millions d'années
Photo Santiago Ramirez

"Nous n'avons jamais retrouvé de fossile pouvant correspondre à une orchidacée, l'une des plus grandes familles de plantes. Par contre, on a découvert récemment, en République Dominicaine, un morceau d'ambre âgé de 20 millions d'années, renfermant une abeille d'une espèce aujourd'hui disparue. Elle porte sur son dos un grand nombre de pollinies ressemblant tout à fait à celles de nos orchidées actuelles".

Par ailleurs, les études qui ont été faites laissent penser que les orchidées sont apparues il y a environ 80 millions d'années, à la fin de l'ère secondaire. "On peut imaginer que les dinosaures herbivores ont mangé des orchidées... C'est après leur extinction massive que les orchidées ont commencé à se diversifier". Aujourd'hui, certaines ont disparu, d'autres sont menacées. En France, 18 espèces sont protégées.

UNE REPRODUCTION HAUTEMENT SPECIALISEE

Les orchidées sont des plantes à fleurs, possédant des ovules enfermés dans un ovaire, et un seul cotylédon : elles font partie des phanergames, des angiospermes et des monocotylédones.

Comme toutes les plantes de cette dernière famille, elles présentent certaines caractéristiques : des sépales et pétales au nombre de trois ou d'un multiple de trois, et des feuilles à nervures parallèles.

"On observe sur les racines des orchidées, deux tubercules en général, dont l'apparence est à l'origine de leur nom, orchis signifiant testicule en grec. Ils renferment les réserves de nourriture de la plante. Tandis que l'un l'alimente et se ratatine, l'autre élabore des provisions pour l'année suivante".


Des fleurs espacées sur la tige, ou rassemblées au sommet

Les feuilles, plus ou moins larges et longues, se rassemblent souvent en rosette à la base, ou se répartissent parfois le long de la tige.

Les fleurs constituent une grappe, échelonnée le long de la tige, ou rapprochée vers le sommet.

Hermaphrodite, l'orchidée possède une partie mâle sous forme de deux pollinies. L'ovaire, vrillé, sert de pédoncule.

l'ophrys abeille. Deux pollinies sous forme de petites boules jaunes.

l'orchis bouc. Un labelle étroit et  jusqu'à 10 cm de long


"L'une des particularités de l'orchidée est le labelle, un pétale très différent des deux autres. Au cours du développement de ses boutons, l'ovaire effectue une rotation à 180°, et se tord, pour présenter le labelle vers le bas. Il figure alors une véritable piste d'atterrissage pour les insectes, avec des balises colorées et odorantes."

Les orchidées émettent des substances olfactives voisines des phéromones sexuelles des insectes femelles, et chez les ophrys, le labelle prend l'allure d'une mouche, d'une abeille ou d'un bourdon, avec un aspect velouté et des teintes chaudes, brunes ou jaunes. "Il s'agit d'un véritable leurre avec lequel l'insecte essaie de s'accoupler, et féconde ainsi la fleur avec les pollinies qu'il transporte de l'une à l'autre."

Lorsque la fleur n'a pas été fécondée par un insecte, les pollinies se recourbent pour une auto-fécondation.

L'ALLIANCE DE L'ORCHIDEE ET DU CHAMPIGNON


Inutile de déterrer les orchidées trouvées dans la nature pour les replanter dans son jardin, elles ne survivraient pas ! Elles vivent en symbiose avec un mycelium de champignon microscopique.

Un ovaire d'orchidée comporte des millions d'ovules minuscules. Quand il est fécondé, la plante se dessèche et les fruits s'échappent. Ils ne contiennent aucune réserve et, très légers, sont dispersés par le vent.

"La graine doit trouver pour se développer des conditions favorables, au niveau terrain et climat, mais aussi quelqu'un qui lui apporte des substances nutritives : il faut qu'elle rencontre un champignon microscopique qui va coloniser ses racines. Une symbiose où chacun trouve son compte : les filaments du champignon puisent dans le sol l'eau et les éléments minéraux indispensables à l'orchidée. Et il bénéficie de sucres et vitamines qu'il ne synthétise pas."

Une relation aussi extraordinaire que celle que l'orchidée entretient avec les insectes.

l'orchis des marais affectionne les milieux humides. De 15 à 60 cm de haut, cette orchidée fleurit de mai à juillet.

l'épipactis helleborine se rencontre dans des forêts de feuillus ou sur le bord des sentiers. Elle fleurit de juin à septembre et atteint de 30 à 80 cm de haut.

le limodore à feuilles avortées possède des feuilles rachitiques. Atteignant jusqu'à 80 cm de haut, il fleurit d'avril à juillet.


"Dans le Var, les orchidées appartenant au genre serapias qui ne poussent que sur des terrains siliceux, se trouvent dans l'est du département, dans les massifs des Maures et de l'Estérel."

serapias à petites fleurs photo internet
serapias à petites fleurs photo internet
serapia en coeur capture d'écran
serapia en coeur capture d'écran

LA NOMENCLATURE DE LINNE

Carl Von Linné en lapon photo internet
Carl Von Linné en lapon photo internet

 Carl Von Linné, naturaliste suédois du 18ème siècle, est le premier à recenser, nommer et classer le monde du vivant en général, et les plantes en particulier, selon un système binominal comportant le genre et l'espèce. Il choisit comme critère leurs organes de reproduction, ce qui explique peut-être que son système de classification ait perduré, bien que lui-même ne soit pas évolutioniste.

Pour cela, il s'appuie sur ses observations personnelles, et celles d'un réseau de correspondants aux quatre coins du monde.

Cette nomenclature reste encore en vigueur aujourd'hui, avec quelques modifications, et les plantes changent parfois de nom au cours du temps.